L'imprécision de la clause de non-recours

Par un arrêt du 10 avril 2025, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a énoncé qu’une clause de non-recours qui est imprécise ne peut exonérer le bailleur de son obligation de délivrance.

Dans cette affaire, la société DoubleTrade, locataire de locaux à usage de bureaux appartenant à la société CNP Assurances, a assigné cette dernière en 2009 en référé aux fins d’expertise sur des désordres affectant les locaux, invoquant notamment de nombreuses infiltrations d’eau.

Un expert a été désigné.

La locataire a ensuite signifié un congé pour le 14 septembre 2010.

Le 19 octobre 2011, la bailleresse a assigné la locataire en paiement de loyers et charges impayés, d'une clause pénale, du coût de réparations locatives et de dommages-intérêts.

Après le dépôt du rapport de l’expert judiciaire, le 31 octobre 2015, la bailleresse a mis en cause son assureur, la société ALLIANZ, et la locataire a demandé, à titre reconventionnel, le remboursement d'une partie des loyers et charges ainsi que l'indemnisation des préjudices nés d'un manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance.

Néanmoins, le jugement de première instance et la Cour d’appel de Versailles ont rejeté les demandes de la locataire en se référant à la clause de non-recours stipulée à l’article 6.3 du bail qui écartait toute responsabilité de la bailleresse :

le preneur s'engage pour lui-même et ses assureurs à renoncer à tout recours contre le bailleur et ses assureurs du fait de la destruction ou de la détérioration totale ou partielle de tous matériels, objets mobiliers, valeurs quelconques et marchandises, du fait de la privation ou de troubles de jouissance des lieux loués et même en cas de perte totale ou partielle des moyens d'exploitation.

La locataire forme alors un pourvoi en cassation en indiquant qu’une telle clause ne peut décharger la bailleresse de son obligation délivrance.

La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel et donne raison à la locataire, sur le fondement des articles 1719 et 1720 du Code civil, en rappelant qu’une clause de non-recours, qui n'a pas pour objet de mettre à la charge du preneur certains travaux d'entretien ou de réparation, n'a pas pour effet d'exonérer le bailleur de son obligation de délivrance.


Benjamin Vidal